L’art de bien ajuster un masque : protéger sans compromis

7 juin 2025

Pourquoi l’ajustement du masque est décisif pour la protection ?

Porter un masque est devenu aussi évident que mettre une blouse ou se laver les mains en établissement médico-social. Pourtant, il est facile de perdre de vue que l’efficacité d’un masque ne dépend pas uniquement de sa qualité, mais aussi, et surtout, de son ajustement sur le visage. Selon une étude publiée dans la revue Nature Medicine, un masque chirurgical mal ajusté laisse passer jusqu'à 30% des particules fines par les côtés (Chu et al., 2020). Or, les virus respiratoires comme la grippe ou le SARS-CoV-2 profitent justement de ces failles pour se transmettre.

Bien ajuster un masque, c’est offrir une double protection : protéger les autres des projections émises à travers la parole, la toux ou les éternuements, mais aussi se protéger soi-même contre les agents infectieux portés par l’air ambiant ou les gouttelettes. Un masque mal placé ou distendu devient vite un simple accessoire sans réelle valeur barrière. Pourtant, en pratique, les erreurs d’ajustement sont fréquentes, et ce, même chez les professionnels de santé aguerris (Société Française d’Hygiène Hospitalière, 2022).

Comprendre la notion d’ajustement : anatomie d’un masque efficace

Avant d’aborder les bons gestes, il importe de rappeler ce qu’on attend d’un masque bien ajusté. Un masque, qu’il soit chirurgical ou de type FFP (masque de protection plus haute), doit remplir plusieurs critères :

  • L’étanchéité : Il ne doit pas y avoir de fuite d’air notable au niveau des contours (nez, joues, menton).
  • L’immobilité : Le masque ne doit pas glisser ni s’affaisser pendant la parole ou les mouvements.
  • Le confort : La pression des élastiques ne doit pas provoquer d’irritation ou d’inconfort susceptible d’amener à le repositionner fréquemment.
  • L’intégrité : Ni le masque ni ses attaches (élastiques, barrette nasale) ne doivent être endommagés ou déformés.

Un fait à noter : une récente enquête auprès de soignants en EHPAD a révélé que 88% d’entre eux estimaient correctement porter leur masque, mais qu’une observation indépendante montrait une mauvaise étanchéité chez près de la moitié (Infection Control & Hospital Epidemiology, 2021).

Distinguer les différents types de masques : quel ajustement, pour quel contexte ?

  • Masque chirurgical : Destiné à empêcher la projection de gouttelettes. Son ajustement doit épouser correctement le nez et le menton, mais une très légère fuite latérale reste admise selon les normes.
  • Masque FFP2 ou FFP3 : Réservé à la protection contre les particules fines (aérosols). Ajustement strict : le masque doit être testé sur le visage pour garantir l’absence de fuite, surtout dans les soins à risque d’exposition.
  • Masque en tissu : Rare en structure de soins, mais parfois utilisé par des visiteurs. L’ajustement dépend beaucoup de la morphologie et de la confection : la barrette nasale et les élastiques réglables sont essentiels.

Pour toute situation impliquant des gestes à risque (toilettes du visage, soins bucco-dentaires, changement de protection), privilégier un masque à haute filtration, correctement ajusté, permet de diviser par dix le risque de contamination (Institut Pasteur, 2021).

Revue détaillée : Les étapes d’un bon ajustement pour chaque masque

1. Avant la pose : inspecter et préparer

  1. Lavage des mains : Impératif avant toute manipulation du masque.
  2. Inspection : Vérifier que le masque n’a pas de trou, de déchirure, ni d’humidité.

2. Mise en place correcte

  1. Ouvrir entièrement le masque : S’assurer qu’il recouvre du haut du nez jusqu’au bas du menton.
  2. Placer la barrette nasale : Appuyer fermement le long de l’arête du nez pour épouser sa forme. La barrette nasale est capitale : une mauvaise adaptation à ce niveau est à l’origine de la plupart des fuites visibles (Société Française d’Hygiène Hospitalière, 2022).
  3. Élastiques ou attaches : Les positionner derrière les oreilles (pour les élastiques courts) ou les nouer derrière la tête (pour les attaches longues ou les FFP2/FFP3). Vérifier que les sangles ne sont ni trop lâches, ni trop serrées, pour assurer à la fois confort et maintien.

3. Vérification de l’étanchéité

  • Ajuster les bords : Presser doucement les bords sur les joues avec les doigts, sans trop manipuler la surface du masque.
  • Test du souffle : Inspirer puis expirer fortement. Sent-on un flux d’air au niveau des yeux ou des joues ? Si oui, réajuster la barrette nasale et vérifier l’attache des élastiques.

4. Pendant le port : vigilance continue

  • Éviter de toucher le masque : En cas de manipulation, désinfecter les mains avant et après.
  • Ne pas descendre sous le menton : Cette pratique annule toute protection et augmente la contamination croisée (OMS, 2021).
  • Remplacer le masque humide ou écrasé : Un masque imbibé ou déformé perd ses capacités filtrantes.

Erreurs fréquentes & fausses bonnes idées : l’œil de l’hygiéniste

  • Laisser le nez découvert : 72% des transmissions de virus respiratoires se font via des particules inhalées par le nez (CDC, 2020).
  • Replier le masque sous le menton pour parler : Cette habitude répand contamination et invalidation du masque.
  • Ignorer l’ajustement sur peaux à barbes : Une étude menée à Londres a démontré que la présence de poils faciaux empêchait l’obtention d’une étanchéité attendue, réduisant l’efficacité jusqu’à 40% pour les FFP2 (BMJ, 2021).
  • Superposer deux masques : Cette pratique, répandue lors des crises sanitaires, ne double pas la protection et peut gêner l’ajustement du masque supérieur.

Adapter l’ajustement à chacun : morphologies et besoins particuliers

Ajuster un masque est tout sauf une science exacte, car chaque visage est différent. Selon une analyse de l’Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS, 2021), plus de 20% des opérateurs de soins déclarent rencontrer des difficultés régulières d'ajustement liées à leur morphologie.

  • Pour les visages étroits ou enfants : Privilégier des modèles de masques adaptés, souvent signalés “taille petite” ou “junior”.
  • Pour les personnes à lunettes : L’utilisation d’un masque bien ajusté (barrette nasale correctement “moulée”) limite de 70% la formation de buée (Revue Prescrire, 2022).
  • Pour barbes et moustaches : Privilégier un rasage intégral en cas d’usage des FFP2/FFP3 ou utiliser une charlotte couvrante dédiée lors des soins à risque.

Pour les résidents en établissement, qui peuvent souffrir de troubles cognitifs, de maladies neurodégénératives ou de handicaps moteurs, l’ajustement doit parfois être assisté d’une tierce personne, avec toujours une attention à la tolérance cutanée et au confort.

Astuces pratiques : bien ajuster… et durer dans la pratique quotidienne

  • Signaler les problèmes d'approvisionnement : Si les masques fournis ne correspondent pas à la diversité des visages, ne pas hésiter à solliciter l’encadrement pour l’achat de plusieurs tailles ou modèles.
  • Former et reformer : Organiser des séances de démonstration régulières, intégrer l’ajustement dans le compagnonnage ou la formation continue, pour éviter la dilution des bonnes pratiques.
  • Créer une “check-list ajustement” affichée en salle de pause ou à l’entrée des unités de soins :
    • Masque intact ?
    • Barrette bien positionnée ?
    • Bords plaqués ?
    • Menton et nez couverts ?
  • Rotation lors des pauses : Prévoir une alternance pour permettre à chacun de changer son masque dès qu’il est humide, écrasé, ou que la protection chute.

Prolonger la réflexion : l’ajustement, pierre angulaire de la culture de sécurité

Un geste apparemment simple comme bien ajuster un masque est, en réalité, le reflet d’une culture de la sécurité collective. Les études récentes confirment que la qualité de l’ajustement a un impact tangible sur la transmission des infections : une revue systématique dans The Lancet soulignait qu’un masque correctement porté divise par six le risque de transmission d’agents pathogènes en environnement à haut risque (Chu et al., 2020).

L’ajustement optimal n’est pas qu’un détail technique ou une “surveillance tatillonne” : c’est une pierre angulaire pour préserver la santé des plus vulnérables et de celles et ceux qui les accompagnent. Adapter, surveiller, corriger, innover dans l’ajustement des masques, c’est investir dans la sécurité au quotidien.

Pour aller plus loin, n’hésitez pas à partager vos observations sur le terrain ou à questionner vos habitudes en équipe : le retour d’expérience demeure l’outil le plus fiable pour progresser ensemble.

En savoir plus à ce sujet :